Les cuves des réacteurs EPR montrent un défaut majeur de conception

Dans Fossiles par le 1 décembre 2021Commentaires fermés sur Les cuves des réacteurs EPR montrent un défaut majeur de conception

Dimanche 28 novembre, la Commission de recherche et d’information indépendantes sur la radioactivité (Criirad) a annoncé avoir reçu des informations selon lesquelles les problèmes rencontrés, cet été, par le premier EPR mis en service seraient liés à la conception du réacteur. L’association explique que des vibrations pourraient être à l’origine des ruptures de gaines constatées en Chine. Le défaut pourrait concerner tous les réacteurs EPR. Au-delà de l’alerte, l’association « interpelle l’ASN et demande la plus grande transparence » en matière d’énergie nucléaire.

Pour rappel, en juin dernier, CNN révélait la détection d’une concentration anormale de gaz rares dans le circuit primaire du réacteur 1 de Taishan, une anomalie liée à des ruptures de gaines de combustible. Le mois suivant, EDF mettait en avant ses doutes concernant la gestion de l’incident par l’exploitant du réacteur, la coentreprise TNPJVC, détenue à 70 % par l’entreprise chinoise CGN et à 30 % par EDF. En France, le réacteur serait déjà à l’arrêt, expliquait EDF, faisant ainsi pression sur son partenaire. Finalement, le réacteur a été arrêté la semaine suivante, le 30 juillet.

De son côté, dès juin, l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN), annonçait avoir engagé « un dialogue technique » avec son homologue chinois (la NNSA). Le gendarme du nucléaire français compte « examiner dans quelle mesure le retour d’expérience de la situation d’exploitation actuelle à Taishan peut être pris en compte dans le cadre de l’instruction en cours de la demande de mise en service de l’EPR de Flamanville [Manche] ».

Un défaut identifié sur la cuve ayant servi de modèle

Selon les informations transmises à la Criirad par un lanceur d’alerte travaillant dans l’industrie nucléaire, les ruptures des gaines de combustible radioactif proviendraient d’un défaut de conception de la cuve de l’EPR. Ce défaut entraînerait une mauvaise répartition du flux hydraulique et, par voie de conséquence, des vibrations très importantes sur les assemblages. Ces vibrations seraient à l’origine d’une usure anormale des grilles de maintien des crayons et de ruptures de gaines, aboutissant à la dispersion de débris radioactifs dans le cœur du réacteur. L’usure de certaines gaines aurait été constatée dès le premier cycle de fonctionnement du réacteur. Le deuxième cycle aurait accentué l’usure des assemblages fragilisés à l’issue du premier cycle.

Si ces éléments sont avérés, ils pourraient concerner toute la filière des EPR

Voir le doc complet de la CRIIAD >>

« Si ces éléments sont avérés, ils pourraient concerner toute la filière des EPR », poursuit la Criirad, jugeant que ce retour d’expérience doit aussi être pris en compte dans le design de la nouvelle version du réacteur (EPR2). La Criirad explique que la cuve de l’EPR, de conception franco-allemande, s’inspire de celle du réacteur allemand Konvoi dont l’« hydraulique en fond de cuve [n’est] pas très réussi ».

Conséquence : « Un courant transverse se crée dans le cœur [des réacteurs Konvoy] et fait bouger les assemblages, surtout ceux en périphérie. S’agissant de l’EPR, le problème aurait été identifié dès 2007-2008, lors d’essais sur maquette à l’échelle 2/10ème, sans que ne soit trouvée de solution satisfaisante, explique la Criirad. « Si ces faits sont avérés : pourquoi la géométrie du fond de cuve EPR n’a-t-elle pas été remise en cause à ce moment-là ? », interroge la Criirad.

Pour l'instant, la Criirad explique que « les informations dont elle dispose restent à vérifier et valider ». Mais elles sont « suffisamment solides et cohérentes pour justifier » l'envoi d'un courrier à l'ASN. Si le problème est avéré, il « pourrait hypothéquer le démarrage des réacteurs de Flamanville et Olkiluoto ». En effet, les travaux de réparation d'un tel défaut « [pourraient] s'avérer particulièrement complexes et onéreux, si tant est qu'ils soient réalisables ». Selon une source interne à EDF, « si une rupture intervenait, il y aurait forcément des rejets radioactifs importants à l'extérieur, pour éviter que l'enceinte ne monte en pression ». Quelles ont été les conséquences de l'incident chinois en termes de contamination de l'eau du circuit primaire et de rejets radioactifs dans l'atmosphère ? On n'en sait rien !
Les industriels du nucléaire espèrent sauver leur filière avec le nouveau concept des SMR, des réacteurs de petite taille. En France, EDF vante la puissance de son modèle. Pourtant, plusieurs études pointent le gouffre financier et l’aberration écologique que constitue cette technologie.
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